2. Effets de la régularisation sur le niveau d’eau et le débit

2.1 Quel était le but de la construction de la Voie maritime et du barrage hydroélectrique? 

Les principaux objectifs des aménagements de la Voie maritime et du barrage hydroélectrique sur le fleuve Saint-Laurent étaient d’assurer un apport d’eau constant pour la production d’hydroélectricité, un niveau et un débit suffisants pour la navigation et la réduction des inondations en amont et en aval des installations. Ces objectifs sont reflétés dans l’ensemble des critères et des exigences contenus dans l’ordonnance d’approbation de la CMI permettant la construction et l’exploitation de ces ouvrages.

2.2 Quels étaient les facteurs à l’origine des fluctuations de niveau dans le lac Ontario avant la régularisation, et quels sont-ils depuis? 

Les facteurs naturels qui influaient sur le niveau d’eau du lac avant la régularisation sont restés les mêmes après la régularisation. Ils comprennent les eaux en provenance du lac Érié et les régimes climatiques (précipitations, vent et températures) qui, ensemble, influent sur le réseau hydrologique. Les ajustements de courte durée du débit du lac Ontario n’ont que très peu d’effet sur le niveau d’eau du lac en comparaison aux facteurs naturels.

2.3 Quel était le cycle annuel « naturel » du niveau d’eau dans le lac Ontario avant la régularisation et qu’en est-il depuis?

Au fil des ans, l’eau atteint son niveau de pointe au début de l’été et son niveau d’étiage au début de l’hiver, en moyenne, et ce avant et après la régularisation. Les variations annuelles du cycle hydrologique peuvent modifier la synchronisation entre ces hauts et ces bas. L’intervalle de fluctuation moyen entre les creux de l’hiver et les sommets de l’été sont semblables; avant la régularisation, l’écart était d’environ 0,49 m (1,6 pi), et depuis le début de la régularisation en 1960, il est d’environ 0,50 m (1,6 pi). De plus, depuis le début de la régularisation, le passage du niveau de pointe estival au niveau d’étiage hivernal se fait un peu plus rapidement, en moyenne.

2.4 Pourquoi le niveau d’eau du lac Ontario était-il plus bas avant la régularisation? 

Le niveau d’eau du lac Ontario était plus bas, en moyenne, avant la régularisation, car les apports d’eau étaient inférieurs à l’époque. Sans la régularisation, le lac Ontario aurait atteint de nouveaux sommets à plusieurs reprises depuis 1960. Même si la régularisation a atténué les conséquences des apports élevés, elle ne les a pas complètement éliminés. À titre d’exemple, en 2017, le niveau du lac a atteint un sommet de 75,88 m (248,95 pi) avec la régularisation. Si les ouvrages et les procédures de régularisation n’avaient pas été en place, le niveau aurait atteint environ 76,06 m (249,54 pi), soit quelque 18 cm (7,1 po) de plus.

En revanche, au cours des années sèches du milieu des années 1960, le niveau du lac Ontario aurait été environ 60 cm (2 pieds) plus bas à certains moments qu’il ne l’a été avec la régularisation. Même si les exemples ci-dessus indiquent que les résultats de la régularisation durant les conditions extrêmes d’apport en eau peuvent être importants, en général, durant les périodes plus normales, la régularisation ne modifie le niveau d’eau du lac Ontario que de quelques centimètres/pouces, ce qui n’est pas significatif.

2.5 Depuis la régularisation, qu’est-ce qui fait fluctuer le niveau d’eau dans le fleuve Saint-Laurent? 

Le fleuve Saint-Laurent commence à l’embouchure du lac Ontario et il se jette dans le golfe du Saint-Laurent, puis dans l’océan Atlantique. Les effets de la régularisation du lac Ontario se font sentir jusqu’à Trois-Rivières (Québec), en aval, où les effets des marées deviennent plus dominants. La frontière internationale entre le Canada et les États-Unis se trouve entre les rives du fleuve jusqu’au barrage Moses Saunders à Cornwall (Ontario) et à Massena (État de New York). À environ 10 km (6 milles) en aval de ce point, le fleuve est entièrement à l’intérieur du Canada, quoique le bassin versant se prolonge aussi jusqu’aux États-Unis.

Après la régularisation, les facteurs naturels comme les précipitations, le ruissellement et les ondes de tempêtes causées par les vents forts ont continué à influer sur le niveau du fleuve Saint-Laurent et de ses affluents. L’affluent le plus important est la rivière des Outaouais, qui a une grande incidence sur le niveau et le débit du fleuve en aval de son point de confluence, à la hauteur du lac Saint-Louis. La régularisation permet de diminuer l’eau provenant du lac Ontario lorsque le débit de la rivière des Outaouais est élevé.

Comme avec tous les grands barrages, le niveau d’eau en amont du barrage, dans le lac St. Lawrence, est principalement déterminé par le débit du barrage. Ainsi, un débit élevé fait baisser le niveau du lac et un débit faible le fait monter. En plus d’être influencé par le débit du fleuve, le niveau varie sous l’effet de vents forts qui soufflent à la surface de l’eau, ce qui peut causer des ondes de tempête n’importe où sur le fleuve.

2.6 Quelles étaient les fluctuations de niveau « naturelles » dans le fleuve Saint-Laurent, en aval de Cornwall/Massena, avant la régularisation? 

Avant la régularisation, le tronçon du fleuve Saint-Laurent situé en aval de Cornwall, en Ontario, et de Massena, dans l’État de New York, subissait des fluctuations extrêmes de niveau et de débit, qui ne faisaient que refléter celles du lac Ontario. Elles étaient atténuées dans une certaine mesure par les rapides qui se trouvaient auparavant dans le fleuve. Pour les secteurs en aval du lac Saint-François, le débit du fleuve Saint-Laurent dépendait également de celui de la rivière des Outaouais. Les fluctuations les plus extrêmes, toutefois, étaient causées par les embâcles qui se produisaient fréquemment dans le fleuve. La capacité de régularisation du barrage Moses-Saunders et l’exploitation par Hydro-Québec du complexe Beauharnois ont essentiellement éliminé le risque d’inondation par des embâcles. Comme le barrage peut réduire le débit du lac Ontario pour compenser l’excès d’eau dans la rivière des Outaouais, les inondations en aval de sa confluence avec le fleuve Saint-Laurent, près de Montréal, ont diminué elles aussi.

2.7 Quelles sont les mesures prises par le Conseil international du Lac Ontario et du fleuve Saint-Laurent (CILO-FSL) pour gérer les glaces dans le fleuve en hiver?

La régularisation du débit du lac Ontario a beaucoup réduit l’incidence des embâcles dans le fleuve Saint-Laurent, en amont et en aval du secteur de Cornwall/Massena. Avant la régularisation, les embâcles fréquents dans le fleuve étaient une grande cause des fluctuations de niveau extrêmes et de l’inondation des propriétés riveraines.

En hiver, le Conseil, de concert avec son Groupe consultatif sur les opérations, surveille de près la formation des glaces dans le Saint-Laurent. Il peut augmenter ou diminuer le débit en provenance du lac Ontario, selon les conditions, aux fins de la gestion des glaces. Par exemple, il diminue parfois le débit du lac conformément aux règles de la limite I du Plan 2014 afin de réduire la vitesse du courant et de favoriser la formation d’un couvert de glace stable. Un couvert stable aide à empêcher que des morceaux de glace s’accumulent dans des secteurs plus étroits ou obstrués et qu’ils créent des embâcles qui provoquent des inondations. Un couvert de glace stable prévient aussi le colmatage, par de la glace non consolidée, des prises d’eau servant à la production d’hydroélectricité. Par contre, à d’autres moments, le Conseil augmente le débit pour aider à briser la glace non consolidée et à évacuer les morceaux qui sont restés pris ou dont la présence est nuisible à certains endroits. Après avoir consenti des écarts par rapport au plan, le Conseil réévalue le débit du lac dès que l’occasion se présente, pour redonner au lac le niveau qu’il aurait eu si le débit prévu avait été respecté.

Dans le Saint-Laurent, le couvert de glace commence habituellement à se former dans le cours inférieur du fleuve, juste en amont de la région de Montréal, dans le canal de Beauharnois, puis il progresse en amont du barrage Moses-Saunders, dans le tronçon international. Quand le couvert est stable assez loin en amont dans le tronçon international, on peut abaisser les vannes du barrage Iroquois pour favoriser l’englacement en amont, vers le lac Ontario. On a également recours à des estacades pour encourager la formation du couvert de glace.

2.8 Pourquoi le niveau du lac St. Lawrence est-il bas lorsque le débit est élevé? Quels sont les avantages et les inconvénients d’une telle situation?

Le niveau du lac St. Lawrence, situé juste en amont du barrage à Cornwall/Massena, baisse lorsque le débit du barrage est augmenté, puisque le débit du lac Ontario augmente par la même occasion. La hauteur de chute plus basse qui en résulte, c’est-à-dire la différence de niveau d’eau entre les deux côtés du barrage, peut réduire la quantité d’électricité produite si elle n’est pas compensée par une augmentation du débit. Dans ce cas, un niveau plus faible, combiné à un courant plus fort du fait de l’augmentation du débit, rend la navigation de plaisance plus dangereuse. Ce phénomène se produit dans les biefs situés en amont de barrages de régularisation des eaux, et il faut en tenir compte lors de la sélection de l’emplacement des quais, des embarcadères et des marinas. Le niveau du lac St. Lawrence est également touché par le niveau du lac Ontario, de sorte qu’il peut baisser énormément lorsque le niveau est de bas à normal sur le lac Ontario et lorsque celui-ci reçoit des apports extrêmement élevés, ce qui explique les baisses sans précédent enregistrées en 2018.

2.9 De quelle façon la régularisation du lac Ontario réduit-elle les inondations dans la région de Montréal?

Historiquement, la ville de Montréal s’exposait aux inondations, car elle est située au confluent de la rivière des Outaouais et du fleuve Saint-Laurent, mais la régularisation du débit du lac Ontario a permis de réduire ces inondations. Les crues printanières dans le bassin de la rivière des Outaouais peuvent être très élevées; elles peuvent décupler en quelques heures. La régularisation en temps opportun du débit du lac Ontario a très souvent contribué à éviter de graves inondations dans les régions de Montréal et du lac Saint-Louis durant les crues de la rivière des Outaouais. D’ordinaire, la réduction de ce débit est compensée par un débit plus élevé avant ou peu après la crue de la rivière des Outaouais. De plus, tel qu’indiqué plus haut, le contrôle des glaces, rendu possible par la régularisation, a énormément diminué les inondations causées par des embâcles.