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Les coprésidents du nouveau conseil de la Commission s’intéressent aux changements climatiques et à la résilience des berges

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Kevin Bunch
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La Commission mixte internationale est coprésidée par Pierre Béland (Canada) et par Jane Corwin (États-Unis) depuis mai 2019. Tous deux ont grandi dans régions différentes du bassin des Grands Lacs et ont un passé différent en lien avec la CMI. Pourtant, ils partagent les mêmes priorités qu’ils espèrent voir reprises par l’organisme en 2020 et dans les années à venir.

Béland : Un retour après 20 ans

 

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Coprésident de la Commission, Pierre Béland

L’histoire qui lie le coprésident canadien, M. Béland, à la CMI a commencé par les bélugas.

Il était alors biologiste marin et océanographe et étudiait les baleines dans l’embouchure du Saint-Laurent. Il avait constaté que l’organisme de ces animaux regorgeait de produits chimiques toxiques, de pesticides et d’insecticides, dont les diphényles polychlorés (BPC), le DDT et le Mirex, un insecticide qu’il n’avait pas reconnu à l’époque.

La seule autre espèce chez qui lui-même et d’autres chercheurs ont trouvé des preuves de contamination au Mirex (désormais interdit) est l’anguille d’Amérique. Après moult observations, ils en vinrent à la conclusion que le béluga se nourrissait de cette anguille qui absorbait le produit chimique lors de ses mouvements migratoires entre l’océan Atlantique et le lac Ontario.

« Ce lien de cause à effet était incroyable, » affirme l’intéressé. « C’est dans ces conditions que j’ai intégré la communauté de recherche des Grands Lacs. »

Sa carrière de scientifique a amené ce natif de la ville de Québec à sillonner le monde. En collaboration avec les Musées nationaux du Canada, il a contribué à reproduire les écosystèmes du temps des dinosaures; en Inde, il a étudié les dauphins du Ganges et à animé une série télévisée hebdomadaire sur l’environnement. En 1995, ses recherches sur les Grands Lacs l’ont amené à devenir commissaire de la CMI, poste qu’il a occupé jusqu’en 1998. Au milieu de son mandat, il a été nommé coprésident canadien par intérim.

À cette époque, il avait surtout voulu convaincre les gouvernements d’appréhender le dossier des voies navigables transfrontalières de façon plus holistique, de le considérer dans le cadre de bassins hydrographiques élargis. Cette position a été concrétisée dans un rapport de 1998 intitulé « La CMI et le XXIe siècle » pour finalement devenir l’Initiative internationale sur les bassins hydrographiques, qui existe toujours, et donner lieu à la création de conseils des bassins hydrographiques chargés de tenir compte des besoins de la population, de la faune et des eaux de la région.  

En 2018, peu après avoir déménagé à Montréal où il exploitait une entreprise d’équipement scientifique pour la recherche aquatique, M. Béland a appris que la CMI recherchait de nouveaux commissaires. Jugeant que le moment était idéal pour reprendre du service, il a vendu son affaire, a postulé et a été choisi comme nouveau coprésident canadien.

Corwin : Une nouvelle étape au service du public

 

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Coprésidente de la Commission, Jane Corwin

La coprésidente américaine, Mme Corwin, a passé la majeure partie de sa vie à Buffalo, dans l’État de New York, aux confins de la rivière Niagara et des lacs Érié et Ontario. Elle y a vécu en femme d’affaires prospère pendant des années, avant de vendre son entreprise en 2004. Puis, l’occasion pour elle s’est présentée de se lancer en politique et de briguer un siège à l’Assemblée législative de l’État de New York.

« J’ai pensé que c’était le bon moment de faire quelque chose comme cela, dit-elle, d’autant que mes enfants avaient grandi et commençaient à quitter le nid familial. »

Elle a été élue en 2008 et a siégé à l’assemblée jusqu’en 2016. Pendant tout ce temps, elle a été membre du Comité de conservation de l’environnement de l’État. Elle y a beaucoup appris sur divers enjeux environnementaux, comme la qualité de l’eau, les espèces envahissantes et les eaux de ballast, ainsi que le nettoyage de sites contaminés en milieu urbain.

 « Cela m’a fait réaliser à quel point il est important de prendre soin de l’environnement, qui a une véritable incidence sur tous les aspects de notre vie », estime-t-elle.

C’est aussi à l’Assemblée législative qu’elle a pris conscience du rôle de la CMI dans toute interaction intergouvernementale d’ampleur internationale et qu’elle s’est intéressée à la perspective et à l’approche uniques de la Commission en matière de résolution de problèmes. Quand l’occasion s’est présentée, Mme Corwin a été ravie d’assumer le rôle de coprésidente de la CMI.

Elle estime que son expérience de représentante permet à la coprésidente qu’elle est devenue d’apprécier les différents points de vue et les différentes valeurs des gens à l’égard de leurs réseaux locaux d’approvisionnement en eau. Là où les uns voient une éventuelle activité récréative, d’autres peuvent voir la possibilité de consommer de d’alcool et d’autres encore l’occasion de vivre leurs traditions culturelles.

« Je juge important que les commissaires tiennent compte de tous ces intérêts envers l’eau quand ils prennent leurs décisions », devait ajouter Mme Corwin.

Changements climatiques : Le grand défi

Mme Corwin et M. Béland sont d’avis que les changements climatiques sont une grande priorité. Selon Mme Corwin, le phénomène exacerbe les problèmes dans tout le système des eaux transfrontalières, notamment le niveau élevé des Grands Lacs en raison d’une série d’années pluvieuses. Elle et d’autres commissaires sont aux prises avec des problèmes de crues depuis le début de leur mandat.

Pour M. Béland, si les changements climatiques donnent lieu à des années de plus en plus humides dans les Grands Lacs, la régularisation, les courbes d’exploitation et les barrages ne permettront pas de faire baisser le niveau des eaux dans un système aussi vaste. Compte tenu de ces réalités, les coprésidents s’intéressent à la façon dont la CMI peut aider les gouvernements à adapter leurs propres politiques afin de réduire au minimum les dégâts causés par des conditions météorologiques extrêmes.

« Comment pouvons-nous nous adapter à ce genre de situation, qu’il s’agisse de changements climatiques ou plus simplement de crues des lacs? » M. Béland pour sa part essaie d’amener les deux pays à financer une étude « sur ce qu’il est possible de faire, sur la façon de devenir plus résilients, sur la manière d’aider les collectivités ».

« Je pense que les changements climatiques constituent le plus grand défi auquel nous n’ayons jamais été confrontés en tant qu’êtres humains, en tant que sociétés et en tant que collectivités, » devait-il préciser.

Selon lui, la CMI pourrait, par exemple, réunir des experts de divers domaines pour discuter de la situation et adresser des recommandations aux gouvernements.

Mme Corwin quant à elle veut s’assurer que le processus décisionnel de la CMI demeure aussi transparent que possible, puisque la Commission formule des recommandations en matière de politiques. Pour y parvenir, il faut recueillir les réactions de la population et des parties prenantes, et s’assurer que les données recueillies dans le cadre des études de la CMI demeurent accessibles afin que les gens puissent voir comment l’organisation est parvenue à telle ou telle conclusion.

« La transparence au sommet est une priorité absolue », estime Mme Corwin. « Même si nous ne sommes pas un organisme gouvernemental, nous adressons des recommandations aux gouvernements sur les politiques, alors je pense qu’il est important que l’organisme rende des comptes au public. »

En 2019, les coprésidents et d’autres commissaires ont, certes sillonné la région des Grands Lacs de part et d’autre de la frontière, mais ils ont aussi visité les rives du Saint-Laurent et ont poussé leur exploration jusqu’aux au bassin du fleuve Yukon, en Alaska, au Yukon et en Colombie-Britannique.

Ils espèrent visiter les autres bassins transfrontaliers en 2020, y compris ceux du lac des Bois et de la rivière Rouge. Mme Corwin a à peine passé une semaine chez elle entre mai et septembre, et les commissaires ont continué de parcourir le continent à l’automne.

Le plus souvent, les commissaires s’intéressent à des questions précises, mais celles-ci ne deviennent des points de vue ou des priorités de la CMI qu’après avoir été adoptées par l’ensemble des commissionnaires.

Pour prendre connaissance des profils des quatre autres commissaires, voir :

Merrell-Ann Phare et Lance Yohe

Henry Lickers et Rob Sisson.

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.

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