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Restauration de la rivière Dowagiac : démantèlement de barrages et restauration des méandres

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Kevin Bunch
pucker street dam

La rivière Dowagiac, qui coule dans le sud-ouest du Michigan, dans le bassin du lac Michigan, a fait l’objet d’une série de travaux intenses de restauration au cours des dernières années grâce aux efforts des municipalités locales, des organismes fédéraux et de l’État, de la bande Pokagon de Potawatomi (une tribu de Potawatomi) et d’organisations externes. Les responsables sont d’avis que ces travaux nous confèrent une perspective intéressante et apportent de précieux enseignements pour tous les projets de restauration entrepris ailleurs dans les Grands Lacs.

Démantèlement du barrage de Pucker Street

Le barrage de Pucker Street enjambait la rivière Dowagiac, près de la ville de Niles. Comme le barrage ne comportait pas de passe, les poissons migrateurs ne pouvaient pas accéder à l’habitat situé en eau froide, dans la partie amont de la rivière. Une étude de 2011 sur les obstacles à la migration des poissons dans le bassin de la rivière St. Joseph, a jugé que l’élimination du barrage était prioritaire, ce qui a été confirmé dans un exposé que Marcy Hamilton, planificatrice principale de la Southwest Michigan Planning Commission, a récemment présenté à la Joint Aquatic Sciences Meeting (conférence conjointe sur les sciences aquatiques).

Le barrage a été démantelé durant l’été 2021 et le travail de restauration du chenal de la rivière où il se trouvait se poursuit.

Selon Marcy Hamilton, son enlèvement aura nécessité plus de temps et plus de fonds que prévu, ainsi que l’adhésion de toute la communauté riveraine, soit des résidents locaux, de la bande de Pokagon et des guides de pêche qui dépendent de la rivière pour leur subsistance. À l’origine, la Ville s’attendait à un coût de 3,4 millions de dollars, mais la facture totale — payée grâce à des subventions, à une surtaxe des services publics et à des obligations locales — a finalement atteint près de 12 millions de dollars.

« Ce tronçon de 3 milles de la rivière St. Joseph jusqu’au barrage est considéré comme la perle du réseau de la rivière Dowagiac en raison de l’habitat intact qu’il offre, puisque cette section n’a pas été draguée et que le parcours n’a pas été redressé au début des années 1900 », précise Marcy Hamilton. « Comme ils ne pouvaient pas franchir le barrage, les poissons étaient confinés dans cette zone. »

Pour retirer le barrage, la ville a dû convaincre une cinquantaine de propriétaires fonciers d’accepter des servitudes de construction sur leur propriété, négociation qui a pris du temps et de l’argent. Pour satisfaire le milieu de la pêche, la Ville et le ministère des Ressources naturelles du Michigan ont convenu de rénover la rampe de mise à l’eau à côté du barrage (l’État entretenant le site au-delà de ce point) et des experts locaux ont accepté de cartographier bénévolement l’habitat du poisson en aval du barrage, avant et après le démantèlement de ce dernier. La demande de subvention de 232 800 $ pour la restauration de la rampe de mise à l’eau a été soumise à d’approbation de l’Assemblée législative du Michigan en juin 2022, et, compte tenu du calendrier, Marcy Hamilton estime que la construction devrait débuter en 2023.

Un autre barrage sur la rivière Dowagiac, plus près du lac Michigan, le barrage de Berrien Springs, fait office d’obstacle aux espèces envahissantes, dont la lamproie marine, précise Jennifer Kanine, directrice du service des Ressources naturelles de la bande de Pokagon. Étant donné que ce barrage permet le franchissement d’espèces de poissons indigènes et désirables, le démantèlement du barrage de Pucker Street ne devrait pas favoriser la prolifération des espèces envahissantes. La palourde asiatique envahissante est déjà présente dans le réseau fluvial, et Jennifer Kanine rappelle que la priorité de la tribu était de veiller à ce que les espèces indigènes puissent se rétablir et profiter des nouveaux habitats disponibles.

De son côté, Marcy Hamilton mentionne que, même si les populations de poissons empruntant le passage nouvellement aménagé ne font pas l’objet d’un suivi, on a aperçu des saumons arc-en-ciel et des saumons chinook plus en amont, au-delà de l’ancien barrage de Pucker Street.

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Tronçon de la rivière Dowagiac à hauteur de l’ancien barrage de Pucker Street. Le travail de restauration écologique se poursuit. Source : Ville de Nil

Le retrait du barrage a permis de dégager une obstruction en amont qui empêchait le passage des kayaks et des canoës.

M. Hamilton précise que ce travail a été réalisé en collaboration avec le service des parcs du comté et un groupe local sans but lucratif appelé MEANDRS (pour : Meeting the Environmental and Agricultural Needs of the Dowagiac River System). Les guides de pêche et un propriétaire foncier dégagent volontairement le passage pour permettre les activités de pêche et de navigation de plaisance dans le secteur.

Au fil des méandres…

L’autre priorité pour la bande de Pokagon, outre le retrait des barrages, est la restauration des méandres de la rivière Dowagiac. Pour y parvenir, la tribu collabore avec ses voisins au rétablissement du lien entre les anciennes plaines inondables et la rivière, et au rétablissement du tracés antérieur aux travaux des années 1900 afin de ralentir le débit.

Sur sa page web consacrée au projet, la tribu indique que le redressement du cours de la rivière et le drainage des milieux humides étaient considérés comme des « progrès » à l’époque, mais que ces travaux ont considérablement réduit les habitats fauniques, éliminé un filtre naturel qui débarrassait la rivière des nutriments excessifs et provoqué le déplacement des eaux en période de crue. La tribu est d’avis que la restauration de ces méandres naturels et des milieux humides augmentera la résilience du réseau et aidera à atténuer l’ampleur des inondations dans l’avenir.

Après avoir présenté une première demande de subvention en 2010 et après une décennie d’études et d’analyses visant à déterminer si la restauration de la rivière était faisable, la bande de Pokagon a conclu un contrat avec MJ Vandamme Trucking pour entamer les travaux de restauration de la rivière ce printemps.

Les travaux sur les deux premiers méandres, débutés en mars 2022, devraient être en grande partie terminés cette année, estime Jennifer Kanine. Les travaux visant à raccorder la rivière à la plaine inondable et à recréer les méandres devraient être réalisés en grande partie en août, avant la plantation d’arbres, d’arbustes et d’autres plantes indigènes prévue pour l’automne 2022 et le printemps 2023 en vue de recréer l’habitat riverain d’antan en milieu humide.

Une deuxième phase portant sur la reconstitution de trois autres méandres fera l’objet d’une proposition cet été, et les travaux devraient se dérouler dans le courant de l’automne ou l’an prochain, selon les résultats du processus de soumissions. Le coût du projet jusqu’à présent s’élève à 543 383 $, précise Jennifer Kanine, et la première phase des travaux représente 1,4 million de dollars de plus. Le projet est financé grâce à des subventions de la US Great Lakes Restoration Initiative, de l’US Environmental Protection Agency, du US Fish and Wildlife Service, du US Department of Agriculture, du Michigan Department of Environment, de Great Lakes and Energy et du Great Lakes Fisheries Trust.

Dans le cadre du processus de délivrance de permis de l’État, la tribu devra veiller à ce que les plaines inondables reconnectées forment un « écosystème fonctionnel » dans les cinq ans suivant l’achèvement de la deuxième phase. Pour Jennifer Kanine, cela revient à dire qu’il faudra veiller à ce que les parcelles nues et les espèces envahissantes ne représentent pas plus de 10 % de la superficie des plaines inondables. Comme la tribu demeurera éternellement le long de la rivière, Jennifer Kanine précise que la bande de Pokagon a l’intention de maintenir le lien entre la rivière et ces milieux humides et de veiller à ce que la flore et la faune indigènes puissent vivre et prospérer.

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Photo du haut : Méandre sud en date du 7 mai 2022.

Photo du bas : Le même emplacement le 7 juin après des travaux de restauration supplémentaires. Source : Service des Ressources naturelles de la bande de Pokagon

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« À la fin février, à la veille du début du projet en mars, nous avons organisé une cérémonie de bénédiction pour indiquer à tous les esprits que les choses ne seraient pas belles à voir lors des deux premières phases, mais que nous allions corriger un tort qui nous a été fait au fil du temps », rappelle Jennifer Kanine. « Nous avons fait savoir aux esprits que nous allions mener une action juste et faire quelque chose de bien pour les sept générations à venir, qui bénéficieront ainsi d’un paysage amélioré. »

Toujours selon Jennifer Kanine, la tribu est en train de repérer les autres zones où des méandres pourraient être restaurés, ce qui nécessitera un travail de liaison avec les propriétaires fonciers riverains.

Grâce à la restauration de l’habitat qui suivra, la végétation que valorise la tribu pourra s’étendre et les activités de canoë-kayak et de pêche pourront gagner en importance.

« Qui veut faire du canoë ou du kayak le long d’une rivière rectiligne quand ces activités sont beaucoup plus agréables sur une belle rivière sinueuse entourée de végétation peuplées d’oiseaux, de chauves-souris, d’autres mammifères et d’amphibiens? »

Leçons à retenir pour les autres bassins hydrographiques

Pour Jennifer Kanine, le processus de restauration des méandres de la rivière a pris du temps, mais il a incité ceux qui font la même chose ailleurs à « ne pas se décourager ». Elle croit que le travail de restauration complète du bassin pourrait prendre des décennies, mais que chaque pas dans la bonne direction est une bonne chose.

De son côté, Marcy Hamilton fait remarquer que le démantèlement du barrage de Pucker Street a également pris du temps et a nécessité l’adhésion de nombreuses personnes et organisations. Nonobstant la durée du projet, tous ceux qui étaient concernés par le barrage ont fini par y adhérer et par mettre l’épaule à la roue pour assurer la réussite de la restauration de la rivière.

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Kevin Bunch

Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.

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