Carte des sites de sondage où des échantillons d’isotopes ont été prélevés le long de la rivière Milk en 2020. Crédit photo : Tricia Stadnyk
Selon une étude récente, les tronçons du cours inférieur de la rivière Milk au Montana et en Alberta sont particulièrement sujets au phénomène d’évaporation.
L’étude a consisté à mesurer les isotopes des molécules d’eau afin d’évaluer les volumes perdus sous l’effet de l’évaporation pendant l’écoulement. Celle-ci a été financée par l’Initiative internationale des bassins hydrographiques (IIBH) de la CMI sous la houlette de l’Université de Calgary.
« Il faut considérer que les isotopes sont l’ADN de l’eau qui révèle la provenance de chaque gouttelette », estime Tricia Stadnyk, responsable de l’étude et titulaire de la chaire de recherche du Canada de niveau II en modélisation hydrologique à l’Université de Calgary. « C’est la teneur en hydrogène et en oxygène des molécules (les deux éléments qui composent l’eau) qui fait varier la masse d’une gouttelette. »
« Si vous compariez 1 litre (33,8 onces) d’eau lourde et 1 litre d’eau légère, vous sentiriez tout de suite la différence, et il se trouve que des processus tels que l’évaporation contribuent à alléger l’eau à mesure qu’elle suit son cycle naturel, » rajoute la professeure Stadnyk.
« Partant, les chercheurs peuvent suivre le cheminement de l’eau en fonction de sa masse. En théorie, sans l’eau de la rivière St. Mary, les échantillons prélevés dans la rivière Milk ne devraient pas présenter la même masse en raison de l’évaporation », d’ajouter Mme Stadnyk.
Les deux rivières sont connectées par le canal St. Mary, une structure construite il y a plus de 100 ans par le Bureau of Reclamation des États-Unis afin de permettre à l’eau de la rivière St. Mary, qui est alimentée toute l’année, de se déverser dans la rivière Milk, laquelle est naturellement éphémère. Sans cet apport d’eau, la rivière Milk pourrait s’assécher dans les périodes de faible ruissellement ou d’absence de précipitations. En 2020, une partie du canal s’est effondrée, privant ainsi pour la première fois en un siècle la rivière Milk des eaux de la St. Mary’s. C’est ce qui, selon Tricia Stadnyk, a entraîné la tenue de l’étude.
Quelques semaines avant que le canal ne soit réparé, des fonds ont été débloqués pour mesurer la différence entre les isotopes de la rivière Milk et ceux de la rivière St. Marie. Ce travail a été financé dans le cadre d’un projet pilote d’un an visant à déterminer si la surveillance isotopique pourrait permettre d’estimer les débits d’eau, les pertes hydrologiques (évaporation et transit vers les eaux souterraines) ainsi que les volumes déviés.
Relevés hydrologiques du Canada prélève régulièrement des échantillons d’isotopes dans les rivières canadiennes. Mme Stadnyk nous a indiqué qu’elle et ses partenaires ont pu se fonder sur ces travaux pour collecter des échantillons d’eau et affiner leur étude. De plus, l’un des partenaires en question, Innotech Alberta, a fourni des données d’échantillonnage d’isotopes d’une eau prélevée en 2016, ce qui a permis des comparaisons avec une époque où le canal était parfaitement fonctionnel. Un échantillonnage a été effectué dans la rivière St. Mary à des fins de comparaison pour l’étiqueter comme « source » dans la rivière Milk.
L’étude a révélé que les signatures isotopiques (sources d’eau et voies d’écoulement) des rivières St. Mary et Milk sont distinctes, bien qu’elles soient s’apparentent aux signatures des eaux souterraines et des précipitations locales. Les échantillons n’ont été prélevés que dans les tronçons canadiens des deux rivières, bien que la rivière Milk s’écoule vers le nord-est, du Montana à l’Alberta sur une certaine distance avant de repiquer vers le sud, au Montana.
Comme la rivière Milk a prolongé son cours en 2020 après l’effondrement de la structure, celle-ci a subi une évaporation plus importante que par les années passées. Les tributaires orientaux de ce cours d’eau subissent chacun leur juste part de l’évaporation, et le rapport indique que cela influence fortement la « masse » de l’eau dans le tronçon aval de la Milk.
Mme Stadnyk retient essentiellement de cette étude que, les signatures isotopiques des deux rivières étant uniques, il devrait être possible d’utiliser cette information pour suivre la contribution de chaque rivière. Un autre projet IIBH vise à établir un protocole de surveillance régulière des isotopes dans les deux rivières.
Kevin Bunch is a writer-communications specialist at the IJC’s US Section office in Washington, D.C.